La CTM prévoit la gratuité des manuels scolaires pour les lycéens dès la rentrée 2023. Selon les enseignants, ce dispositif favoriserait davantage le numérique. Ils évoquent une crainte de la baisse du niveau sur le moyen terme.

La gratuité des manuels est une bonne chose pour les familles défavorisées” reconnaît Serge Baclet, secrétaire FSU Martinique et professeur de mathématiques au Lycée Bellevue.

Pour la rentrée 2023, la CTM met en place un nouveau dispositif intitulé « Gratuité des livres scolaires« . La collectivité prévoit le versement d’une dotation spécifique « manuels scolaires » à tous les établissements en fonction de leurs effectifs et de leurs choix pédagogiques. Plus d’une trentaine d’établissements ont adhéré au projet offrant un accès gratuit aux manuels à près de 15 000 élèves, de niveau 3 et 4, des lycées CAP, Brevets de Techniciens et Brevets Métiers d’Art, ULIS inscrit en lycée et 3eme prépa métiers Lycée professionnel. Ainsi, en expérimentant la gratuité des livres scolaires pour les élèves, la collectivité souhaite montrer “sa volonté de soutenir le pouvoir d’achat des familles et d’offrir un accès égal aux manuels à tous les lycéens, qu’ils soient scolarisés dans un établissement public ou privé” peut-on lire dans leur communiqué. Mais du côté des enseignants, certains craignent que ce dispositif valorise uniquement les manuels numériques et que cela impacte, à moyen terme, le niveau des élèves.

“Une bascule vers le numérique”

Si la CTM propose aux établissements le choix entre “100% numériques, une formule hybride, ou livres papier uniquement”, les fonds restent les mêmes : “ le coût du dispositif est estimé à 1 156 240 € répartie principalement en dotation forfaitaire de 80€ par élève” rappelle la CTM. Or, quatre-vingts euros par élève ne peuvent suffire à l’achat de tous les manuels en vue du prix unitaire d’un manuel papier. “ Nous allons donc tendre vers une bascule du tout numérique puisque les manuels sont plus accessibles, environ 10 euros contre 20 30 euros en version papier”. Lui, comme d’autres enseignants, reconnaissent les avantages du numérique. “ Les sacs des élèves sont très chargés. Le numérique permet d’alléger le poids et rend ” souligne Serge Baclet. Toutefois, ils sont plusieurs à noter quelques désavantages. “Le numérique nécessite une logistique, une réorganisation dans les salles, des machines qui fonctionnent et un accès internet pour chaque élève à l’école comme chez eux, lequel peut engendrer aussi une disparité sociale ” signale le professeur.

Baisse du niveau par le numérique ?

Une étude internationale a montré que le niveau moyen des jeunes Suédois aurait diminué en lecture et en compréhension écrite ces dernières années. La raison principale viendrait du fait d’avoir délaissé le manuel papier au profit du numérique. Le gouvernement suédois a donc décidé de retourner vers les manuels scolaires. A contrario, en France, le numérique prend de plus en plus de place à l’école. Neuf enseignants sur dix disent reconnaître leurs bénéfices pédagogiques dans le premier degré, selon le baromètre 2023 du syndicat Unsa sur l’état d’esprit des enseignants, publié le 31 mai dernier. Serge Baclet rejoint également cette idée selon laquelle les deux supports devraient être complémentaires. “L’idéal serait d’avoir des manuels dans les salles et du numérique chez les élèves” propose le professeur de mathématiques.

Selon la CTM, les écoles primaires devraient également être concernées par ce dispositif, à partir de la rentrée 2024.

(Par Maëlliss Patti)